Autres remarques
En raison des idées fausses et des tendances séculaires, particulièrement en Occident ces derniers siècles, la plupart des gens définissent la religion comme une foi aveugle, des actes d'adoration dénués de sens, et une simple consolation. De telles mauvaises conceptions se sont développées dans la chrétienté, en partie à cause des défauts et des erreurs historiques du christianisme.
Certains musulmans sécularisés attachés à ce bas-monde ont aggravé cette faute en réduisant l'islam à une idéologie et à un système social, économique et politique. Ils ignorent un fait qui est déclaré dans le Coran, dans les Traditions prophétiques et à travers toute l'histoire islamique: l'islam, la voie du juste milieu loin de tous les extrêmes, s'adresse à tous les sens et facultés de l'être humain, ainsi qu'à l'esprit, au cœur et aux sentiments de chaque individu, et comprend tous les aspects de la vie humaine. C'est pourquoi le Prophète Mohammed accentua l'importance de l'éducation, du commerce, de l'agriculture, de l'action et de la réflexion.
De plus, il encourageait son peuple à faire parfaitement tout ce qu'il faisait, et condamnait l'oisiveté et la mendicité. Par exemple, il dit: «Dieu aime le serviteur croyant et habile.»[1] Le Coran déclare: Et dis: 'œuvrez, car Dieu va voir votre œuvre, de même que Son messager et les croyants'. (9:105) Comme toutes nos actions seront exposées le Jour du Jugement, nous ne pouvons pas nous permettre d'être négligents et de faire les choses sans enthousiasme juste pour nous en débarrasser. De surcroît, le Messager rappelle: «Quand vous faites quelque chose, Dieu aime que vous le fassiez à la perfection.»[2]
L'islam incite les gens à travailler et considère nos efforts légaux pour gagner notre vie et subvenir aux besoins de notre famille comme des actes d'adoration. Contrairement au christianisme médiéval, l'islam n'idéalise ni ne conseille la vie en ermitage. Il interdit la dissipation et la luxure car si nous nous laissons aller dans cette voie et que nous négligeons nos devoirs religieux, notre prospérité dans les deux mondes sera en jeux. Le Messager déclare, dans une parole concise qui résume les fondements d'une vie économique et sociale heureuse et de la prospérité dans ce monde et dans l'autre:
Quand vous êtes impliqués dans des transactions spéculatives, occupés uniquement par l'élevage d'animaux, contentés par l'agriculture, et que vous abandonnez les efforts dans le sentier de Dieu pour prêcher Sa religion, Dieu vous condamnera à une grande humiliation. Il ne la retirera que quand vous retournerez à votre religion.[3]
Ce hadith offre une description très précise de l'état lamentable des musulmans durant ces derniers siècles. Les transactions spéculatives signifient la mort d'une vie économique saine et le recours à des moyens de subsistance illégaux et sans restrictions. Le contentement par l'élevage et l'agriculture est le signe de la paresse et de l'abandon de la recherche scientifique - le Coran annonce clairement que Dieu a créé l'être humain comme Son vice-gérant sur terre et qu'Il lui a confié le savoir des noms des choses.
Cela veut dire que nous ne devons pas nous contenter seulement de l'élevage et de l'agriculture mais aussi développer les sciences et exploiter les ressources naturelles en découvrant les lois divines de la nature et en réfléchissant sur les phénomènes naturels. Ce faisant, nous devons rechercher l'agrément de Dieu et pratiquer l'islam.
Le Coran comporte de nombreux versets tels que: Dis: "Sont-ils égaux, ceux qui savent et ceux qui ne savent pas?" (39:9), qui soulignent l'importance du savoir et de l'apprentissage. Il avertit aussi que Parmi Ses serviteurs, seuls les savants craignent vraiment Dieu (35:28), signifiant que la véritable piété et adoration n'est possible qu'avec le savoir. Confiner le savoir aux sciences religieuses sans faire de réflexion et ni de recherche conduit inévitablement à se contenter de l'élevage et de l'agriculture, dans l'oisiveté et la négligence des efforts dans le sentier de Dieu. Le résultat final est la misère, la pauvreté et l'humiliation.
Le Messager attira l'attention sur ce fait important dans plusieurs autres hadiths tels que: «Une heure de réflexion et de contemplation est meilleure que toute une année d'actes d'adoration (surérogatoires)»[4] et «Le croyant fort est meilleur et préférable au croyant faible».[5] La puissance requiert à la fois une santé physique et spirituelle ainsi que la compétence scientifique et technique. Restreindre le sens d'être «puissant» à la force physique révèle un manque total de compréhension de ce sur quoi le vrai pouvoir se fonde.
Pour conclure, être un bon musulman passe forcément par être un bon élève à l'école du Prophète Mohammed. Citons en exemple Ja'far ibn Abi Talib, le cousin du Prophète, qui émigra en Abyssinie afin d'échapper à la persécution des Qoraïchites. Un jour il dit au Négus, le roi d'Abyssinie: «Ô Roi, dans le passé, nous buvions du sang, mangions de la charogne, commettions la fornication, le vol, le meurtre et le pillage. Les plus forts opprimaient les plus faibles. Et nous faisions aussi beaucoup d'autres choses honteuses et méprisables.»[6]
Le Prophète Mohammed montrait le meilleur exemple pour son peuple dans la croyance, l'adoration et le bon comportement - en bref, dans tous les aspects de la vie. Les gens de son peuple considérant le fait d'avoir des filles comme une source de honte, ils les enterraient vives. Quand le Prophète vint avec le Message divin, les femmes purent enfin jouir de tous leurs droits. Un jour, une jeune fille vint au Messager et se plaignit: «Ô Messager de Dieu, mon père essaie de me forcer à épouser le fils de mon oncle. Je ne veux pas me marier avec lui.» Le Messager envoya chercher son père et lui dit de ne pas agir ainsi. L'homme lui promit qu'il ne ferait pas cela. Puis la jeune fille se leva et dit: «Ô Messager de Dieu, je n'avais pas l'intention de m'opposer à mon père. Je suis venue ici uniquement pour savoir si l'islam permet à un père de marier sa fille sans son consentement.»[7]
Le Messager avertissait ses Compagnons contre la mendicité. Si pauvres et nécessiteux fussent-ils, les Compagnons ne mendièrent jamais auprès de qui que ce fût. Ils étaient si sensibles à ce sujet qu'ils s'abstenaient même de demander de l'aide. Si, par exemple, l'un d'entre eux faisait tomber sa cravache tandis qu'il était sur sa monture, il descendait et la ramassait lui-même plutôt que d'attendre de l'aide de quelqu'un.[8]
Avant l'islam, les gens adoraient des idoles et ne montraient pas le respect dû à leurs parents. Le Message de Dieu leur dit: Ton Seigneur a décrété: "N'adorez que Lui; et (marquez) de la bonté envers les père et mère. (17:23) Ce décret divin les changea de façon si radicale qu'ils se mirent même à demander au Messager s'ils seraient punis s'ils ne répondaient pas aux regards de leurs parents par un sourire. Le Coran leur ordonna: n'approchez pas les biens de l'orphelin (17:34) et leur interdit le vol. Cela les rendit si sensibles aux droits d'autrui que l'histoire ne rapporte pas plus d'un ou deux vols durant toute la période bénie par la direction du Prophète.
Le meurtre était très répandu dans l'Arabie pré-islamique. Toutefois, quand le Prophète vint avec l'interdiction: Et, sauf en droit, ne tuez point la vie que Dieu a rendu sacrée (17:33), ce mal fut totalement supprimé. Le Messager interdit aussi la fornication, ce qui mit fin à toutes sortes d'immoralités sexuelles. L'on trouve malgré tout un incident de fornication pendant cette période:
Un jour, un homme pâle et exténué vint au Messager et s'exclama: «Ô Messager de Dieu! purifie-moi!» Le Messager détourna son visage de lui, mais l'homme insista en réitérant sa demande par quatre fois. Finalement, le Messager demanda: «De quel péché devrais-je te purifier?» L'homme répondit qu'il avait forniqué. Ce péché pesait tellement sur sa conscience qu'il désirait être puni. Le Messager demanda à ceux qui étaient présents: «Est-il sain d'esprit?» Quand on lui répondit qu'il l'était, il demanda s'il était ivre. Ils l'examinèrent et le trouvèrent sobre. Face à sa confession insistante, le Messager dut ordonner que l'homme fût puni. Après quoi, il s'asseya et pleura.
Quelques jours plus tard, la partenaire de l'homme fit appel au Messager pour qu'il la purifie. Il se détourna d'elle et la renvoya à maintes reprises. Mais rongée par le remords, elle insista pour être punie. Le Messager la renvoya une fois de plus en disant: «Il se peut que tu sois enceinte. Va et donne naissance à ton enfant.» Ainsi fit la femme, mais elle revint avec la même requête. Le Messager lui chercha des excuses: «Rentre chez toi et allaite ton enfant.» Après que l'enfant eut été sevré, la femme revint. Quand quelqu'un la blâma pendant qu'elle subissait son châtiment, le Prophète le réprouva et dit: «Par Dieu, cette femme s'est tellement repentie pour son péché que si sa repentance était partagée entre tous les habitants de Médine, elle suffirait à les couvrir aussi de pardon.»[9]
Le Prophète Mohammed a établi un système si parfait et a formé une communauté si excellente que pas même un Platon, un Thomas Moore, un Campanella, ni aucun autre utopiste n'a jamais réussi à imaginer leurs pareils. Parmi des milliers d'exemples, citons celui-ci pour illustrer ce fait:
Abou Houraïra, l'un des Compagnons les plus pauvres, vint auprès du Messager. Il n'avait rien mangé depuis plusieurs jours. Abou Talha (un Ansar) l'emmena chez lui pour le nourrir. Or il n'y avait rien à manger chez lui, sauf de la soupe que sa femme avait préparée pour ses enfants. Elle demanda à son mari ce qu'elle devait faire et ils décidèrent ceci: ils coucheraient leurs enfants sans les nourrir. Comme il n'y avait pas assez de soupe pour les satisfaire tous, seul l'invité devrait y avoir droit. Alors qu'ils seraient assis à table et s'apprêteraient à manger, la femme d'Abou Talha allait faire tomber la bougie, l'éteignant ainsi comme par erreur. Dans l'obscurité qui en résulterait, ils allaient faire semblant de manger, pendant qu'Abou Houraïra allait être le seul à vraiment manger. Et c'est ce qu'ils firent. Abou Houraïra mangea jusqu'à satiété, puis repartit sans se rendre compte de ce qui s'était réellement passé.
Le jour suivant, ils se rendirent à la mosquée pour la prière du matin. À la fin de la prière, le Messager se tourna vers eux et demanda: «Qu'avez-vous fait hier soir qui ait causé la révélation d'un verset faisant vos louanges: [ils les] préfèrent à eux-mêmes, même s'il y a pénurie chez eux. (59:9)?»[10]
[1] Munawi, Faydh al-Qadir, 2:290
[2] Muttaqi al-Hindi, Kanz al-'Ummal, 3:907
[3]Abu Dawud, "Buyu'," 54; Ibn Hanbal, Musnad, 2:84
[4] 'Ajluni, Kashf al-Khafa', 1:370
[5] Muslim, "Qadar," 34; Ibn Maja, "Muqaddima," 10; Ibn Hanbal, 3:366
[6]Bukhari, "Wassaya,"
[7]Nasa'i, "Nikah," 36
[8]Muslim, "Zakat," 108; Ibn Maja, "Jihad," 41
[9]Muslim, "Hudud," 22-23
[10]Bukhari, "Tafsir," al-Hashr, 59:6; Muslim, "Ashriba," 172
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