Les protestations du parc « Taksim Gezi » et l’origine des problèmes
Puisque nous ne suivons pas la voie des prophètes, de leurs héritiers, des saints et des amis sincères de Dieu, nous sommes incapables de régler les problèmes que nous rencontrons. Nous nous engageons à de nombreux actes répréhensibles dans le seul but d’en éliminer un seul. Nous causons différents types d’actes répréhensibles et d’injustices. Nous ne faisons qu’ajouter du feu aux flammes de la haine et de la rancune. Nous agissons pour que les choses deviennent hors de contrôle.
Et aujourd’hui, vous en voyez les exemples dans les rues. Il existe peut-être même de pires exemples. Dans les livres de hadith se référant aux événements chaotiques du futur (Kitab al-Fitan wa’l-Malahim), le Prophète a prédit des événements bien pires. La crise actuelle ne peut donc être considérée que comme un aperçu de ces grands événements chaotiques ; les gens s’entretueront mais aucun d’eux ne saura la cause. Il y aura des dommages répétés contre les personnes et les propriétés, mais nul n’aura aucun fondement raisonnable, licite ni légitime. Les choses se passeront de façon désorganisée. Les prédictions du Messager de Dieu rapportent ces événements en détail ; ces événements actuels semblent donc en être des aperçus à petite échelle.
Si nous considérons ces événements avec légèreté, nous ressemblerons à ces quarante « idiots » : ils se sont tenus les uns les autres par la main afin de pouvoir descendre une falaise, mais bien entendu, ils sont tous tombés ensemble. Trente-neuf sont morts et un seul a survécu avec des blessures graves et des os brisés. Quand les gens lui ont demandé ce qui s’était passé, il a répondu qu’ils avaient presque tous eu des ennuis en traitant la situation avec beaucoup trop de légèreté. Voici comment les personnes insensibles qui ne prennent pas en considération les conséquences, voient généralement ce problème.
Et de l’autre côté, certains disent : « Pourquoi se livrent-ils à la violence et causent-ils tant de dommages ? Pourquoi cassent-ils les verres des fenêtres de personnes innocentes ? Ils jettent des cocktails Molotov dans les maisons, les dortoirs, les écoles, les universités et même dans les banques ! » Un comportement illogique et inhumain prévaut.
Si vous généralisez la question en disant : « Cela n’a rien à voir avec le fait de défendre certains droits », cela signifie alors que vous fermez les yeux face aux demandes innocentes des personnes innocentes qui se trouvent parmi eux. Nous avons tout d’abord négligé ces personnes. Ces générations sont le fruit de notre négligence. Certaines revendications sont acceptables. Ils peuvent dire « Le parc doit être préservé et les arbres ne devraient pas être déracinés. L’écosystème devrait être protégé, et ainsi de suite… » et ne pas conserver l’équilibre en essayant de protéger un parc qu’ils aiment. Par opposition à leur but premier, il se pourrait qu’ils endommagent l’environnement par eux-mêmes, qu’ils perturbent l’harmonie générale et qu’ils ne laissent plus rien pour créer un écosystème. Par conséquent, l’insensibilité au sujet d’une question, ou son incompréhension, peut conduire à un comportement excessif chez certaines personnes alors qu’elle peut mener à une forme différente d’apathie chez d’autres. Que Dieu nous en protège !
En revanche, certaines personnes, qu’elles soient sur le territoire ou à l’étranger, essaient de profiter de nos faiblesses et abusent des innocentes demandes des personnes innocentes (en provoquant les peuples). Tout comme certaines créatures essaient de respirer avec leurs oreilles et d’entendre les sons, de tels agresseurs sont à l’affût de toutes opportunités d’abus. Les médias du monde entier sont à présent contre la Turquie ; malheureusement, ils agissent comme si l’apocalypse avait commencé. Des catastrophes bien pires se sont produites en Syrie, mais les médias ne s’en soucient absolument pas. Des choses semblables se produisent en Irak, mais une fois de plus, les média sont muets. Ils ne se soucient pas non plus des attentats-suicides dans différents pays du monde. Cependant, la Turquie est dans la position critique de devenir un facteur d’équilibre dans la région. Elle a accompli certains types de progrès.
D’une part, il y a ces innocentes demandes. D’autre part, on trouve l’abus de ces demandes par certains cercles au sein du pays, ou l’utilisation de ces demandes comme une réaction par certaines idéologies. D’autres étrangers profitent pleinement des événements pour leurs motivations cachées. Notre négligence et notre incapacité à voir les stratégies d’abus bien planifiées par autrui ont eu pour conséquences les conflits actuels.
En fait, le Messager de Dieu nous a décrit cette situation. Il a dit qu’elle aurait lieu lorsque le peuple se serait éloigné de son héritage spirituel. Pour cette raison, nous devons réviser notre point de vue.
« Qui est à blâmer pour cette agitation ? Ceux qui ont négligé les protestations en les jugeant comme « ceci et cela » ? Ou faut-il incriminer ceux qui sont impliqués dans la violence ? Ou devons-nous incriminer le système global ? » Le problème se situe-t-il dans notre incapacité à élever et à développer de bonnes générations ? Ou dans le fait de ne pas les avoir guidées comme il se doit ? Si tel est le cas, alors le système doit être révisé. Nous devons à nouveau réviser nos propres pensées. Si nous faisons cela – si nous nous faisons face avec honnêteté et nous nous autocritiquons ouvertement – nous pourrons être sauvés de préoccupations plus grandes. Si nous ne nous faisons pas face dès à présent, nous serons plus tard confrontés à des questions que nous ne saurons pas gérer, Dieu nous en protège. Nous devons réviser nos systèmes d’éducation morale. Qui sont ces jeunes qui agissent de façon si déraisonnable dans les rues ? Ils ne poursuivent aucune juste cause ; s’ils le faisaient, ils se rassembleraient quelque part, exprimeraient leurs sentiments de manière civilisée et partiraient ensuite. Certains recevraient leur message et ils pourraient se réunir afin de le répéter à ceux qui ne l’ont pas compris. Ils pourraient devenir en quelque sorte organisés. Étant donné que les gens font leur choix par des élections, ils pourraient travailler sérieusement dans cette voie. Ils pourraient essayer de convaincre les gens en leur parlant de leurs opinions et de leurs plaintes. Ils voteront pour ce qu’ils aiment. S’ils n’aiment pas le choix, ils peuvent attendre patiemment que la prochaine élection arrive et choisir quelqu’un d’autre.
Il semble que nous nous soyons nous-mêmes fait mal. Le cœur de l’affaire repose à un niveau plus profond. Puisque le sol a perdu sa fertilité et que l’atmosphère est devenue corrompue, nous assistons à de tels événements illégitimes et voyons apparaître certaines générations qui représentent ces événements. Jusqu’au moment où nous aborderons nos défauts humains, les problèmes resteront non résolus. Nous avons besoin de voir ce que nous faisons. Nous n’avons pas réussi à réviser le système. « Comment est-il possible pour nous d’élever une génération qui se supervisera avec honnêteté ? Comment pouvons-nous élever une génération humaine qui ne répondra pas à la destruction par plus de destruction mais plutôt par la construction ? » Voici la véritable question et nous avons échoué à y méditer.
Le Coran dit : ...Vous n’avez à répondre que de vous-mêmes (envisagez donc la manière dont vous agirez sur votre propre voie), et l’erreur d’autrui ne saurait vous nuire si vous êtes dans le droit chemin (suivez donc votre voie sans aucune déviation)... (al-Ma’ida, 5 : 105). Autrement dit, votre unité et votre inébranlable marche sur la voie vertueuse permettront d’atténuer les facteurs les plus négatifs. Nous ne nous sommes pas nous-mêmes regardés. Nous n’avons pas vérifié si nous étions sur la bonne voie, sur le chemin vertueux. Nous n’avons pas élevé des générations de jeunes qui étaient conscients du bien et du mal. Nous les avons regardés sans nous en soucier, les considérant simplement « comme un petit groupe ». Et ils ont commencé à semer la zizanie, attaquant ici et là. Ce dont ils ont vraiment besoin, c’est d’être traités avec sympathie et compassion. Ils piétinent les valeurs humaines sous leurs pieds ; ils piétinent leurs propres valeurs. Même s’il semble qu’il soit trop tard pour la génération d’aujourd’hui, il devrait exister des systèmes qui puissent les développer de façon bénéfique pour demain. Que pouvons-nous faire pour les développer ? Que pouvons-nous faire pour leur rappeler que Dieu les a créés dans la forme la plus parfaite et les remettre en conformité avec la voie humaine ? Comment pouvons-nous empêcher qu’ils nuisent aux gens et aux valeurs humaines ? Comment pouvons-nous leur rappeler de ne pas nuire à leur pays afin qu’ils ne permettent pas à d’autres d’en abuser contre leur propre pays et de faire ainsi que nous devions tous faire face à certaines stratégies impossibles à surmonter ?
Si vous affichez une quelconque faiblesse, d’autres projettent généralement d’en profiter. Alors que vous êtes déjà dans un tel état de faiblesse, ils vous écrasent en morceaux, comme ils l’ont fait avec l’Empire Ottoman. Le facteur le plus critique à présent est notre propre faiblesse, nos conflits internes. Même si nous ne pouvons pas changer la situation d’aujourd’hui, les chefs communautaires, les scientifiques, les psychologues et les éducateurs devraient se réunir pour générer des projets pertinents. Que pouvons-nous faire pour ramener les générations qui n’ont pas poursuivi de parcours humain en conformité avec l’humanité ? Comment pouvons-nous les convaincre de servir leur pays, de l’aider à se développer en un grand pays par la grâce de Dieu ?
On ne devrait pas ignorer ni sous-estimer ce qui se passe, tout comme on ne devrait pas prendre le feu ou la guerre avec légèreté. Comme Imruu’l-Qays, un des poètes de l’Arabie préislamique, le disait très justement : « Il y a deux choses que vous pouvez commencer mais que vous ne pouvez pas arrêter, même si vous le voulez vraiment : l’un est le feu et l’autre est la guerre. » Nous avons vu les deux, en effet. Vous pouvez prendre cette déclaration à la fois littéralement et figurativement. En fait, les événements actuels que nous traversons ne sont pas très différents d’un incendie. Puis, il y a la question de la guerre. Comme vous le savez, à cause de quelques aventuriers qui ne savaient pas vraiment comment gouverner un État, des tirs inutiles sur des navires russes sur la mer Noire ont entrainé l’Empire Ottoman dans la première guerre mondiale. Un grand État fut donc amené à sa ruine. Il est essentiel dans notre culture de parler des générations précédentes avec respect, mais je n’arrive pas à pardonner à ceux qui ont causé la destruction d’un État qui avait servi de facteur d’équilibre important entre les puissances mondiales. Laissez-les s’expliquer de ce qu’ils ont fait devant le Tribunal Divin ; mais je ne dis pas : « Laissez-les entrer en Enfer. » Ils rendront des comptes devant le Tribunal Divin. Cet État était si influent. Une pièce de théâtre profane de Voltaire, irrespectueuse envers le Prophète, fut jouée en Europe. C’était à l’époque du sultan Abdoulhamid II., période de décadence au sein de l’empire, le sultan leur lança un ultimatum, disant qu’il allait leur déclarer la guerre en tant que calife des croyants et lancer la marche de l’Inde musulmane sur eux. Même durant une telle période de déclin, comme un lion blessé rugissant, il fit se redresser tout le monde dans la forêt. Ces quelques aventuriers, cependant, amenèrent cet État à sa ruine ; voici donc la vérité qui se cache derrière notre condition misérable présente. Ils se joignirent à la guerre mais furent incapables d’en sortir quand ils le souhaitaient. Elle a tout emporté, comme une inondation. Le feu comme la guerre, n’arrêtent que lorsqu’ils le veulent ! Pour cette raison, si vous êtes en mesure d’éteindre un feu, même s’il est petit, faites-le à l’instant. Sinon, au moment où il aura recouvert un champ complet, il sera trop tard. Ainsi, même lorsque nous sommes face au plus petit des feus, nous devons appeler les pompiers à l’aide en criant : « Il y a le feu ! »
Si les centres éducatifs sont bombardés, si d’innocentes personnes sont tuées, si des gens sont arrêtés avec des bombes de gaz, et si certains ferment les yeux face à tout cela en feignant de ne pas voir les raisons sous-jacentes, alors le feu progresse — Dieu nous en préserve !
Je ne pense pas que le caractère de la nation ait été corrompu jusqu’à ce niveau ; même les plus mauvais ne sont pas aussi mauvais. Cependant, d’autres qui ne souhaitent pas que vous puissiez devenir un facteur d’équilibre, peuvent en profiter. La Turquie est une boule de problèmes, et ceux qui l’entourent peuvent tirer parti de ces problèmes. Même un seul d’entre eux peut tout mettre en désordre. Il existe une entente secrète entre eux de ne pas vous laisser avancer plus loin. Vous pouvez vous consoler avec un apparent « printemps » ici et là, alors qu’en réalité, vous êtes confrontés aux vents glacials de l’automne.
Nous devons donc nous montrer attentifs et agir intelligemment. Nous devons voir les plus petits problèmes comme étant conséquents, et nous avons besoin de les manier de manière intelligente. Si vous êtes confrontés à une invasion de fourmis, ne l’ignorez pas. Elles atteindront vos pots de beurre et de miel et les pollueront avec des toxines ; ne l’ignorez pas. Prendre les problèmes avec légèreté découle d’une pensée légère, d’un raisonnement léger et d’un jugement léger. Il est très important de voir les choses clairement, comme elles sont. Il devient alors possible de générer les stratégies et les projets qui conviennent.
Les âmes dévouées à la construction d’une nouvelle renaissance doivent être très prudentes à ce sujet, très prudentes même. Ce qui se trouve entre nos mains est une confiance que nous avons héritée des générations précédentes. Si nous sommes confrontés à la violation d’un droit personnel, nous pouvons y être indifférents si nous le souhaitons. Mais la violation d’un droit collectif — nous pouvons également les appeler les droits de Dieu — ne peut être ignorée. Dieu juge gravement les responsables. Si nous ne mettons pas une barrière face aux événements qui résulteront en une trahison contre une nation entière — que Dieu nous en protège — le problème se développera tant que notre négligence deviendra une trahison de confiance. Cependant, nous devons protéger la confiance envers et contre tout, tout comme nous protégeons notre vie et notre honneur, jusqu’à ce que nous la transmettions aux générations futures, dignes de confiance. Remplissons nos responsabilités, plaçons notre confiance en Dieu et voyons ensuite ce que Dieu va décréter pour nous. Dieu le Tout-Puissant fera un jour dire de la part même des oppresseurs : Dieu vous a préféré au-dessus de nous, comme les frères repentis du prophète Joseph lui dirent une fois.
Nous devons réciter des prières contre la malveillance. Vous pouvez diviser les parties d’un livre de prières, comme Al-Qulub ad-Daria, entre amis et ainsi le compléter collectivement en récitant ses prières et ses litanies. Vous pouvez également lire les noms du As’hab al-Badr ; les âmes bénies de ces compagnons ne sont pas différentes des âmes des êtres spirituels célestes. Cela fut testé à différentes reprises ; ces prières sont devenues une invitation pour la Divine Providence et des problèmes apparemment insolubles sont résolus par la grâce de Dieu.
Des personnes comme nous ne peuvent faire que bien peu ; peut-être ai-je parlé en vain. Jusqu’au moment où nous nous redresserons... J’ai entendu une histoire de Osman Tarı, un ancien membre du Parlement. Une personne savante connue sous le nom de Tahir Efendi comptait parmi les membres du premier Parlement de la République turque. Alors que d’autres faisaient des discours enthousiastes, il préférait garder le silence dans un coin. Un jour, ses partisans insistèrent pour qu’il parle lui aussi ; ils dirent que d’autres étaient fiers des discours de leurs représentants et qu’ils voulaient également l’être. Tahir Efendi était une personne qui faisait des remarques courtes mais concises. Il répondit ainsi : « Chère congrégation, sachez que vous êtes les électeurs et que je suis l’élu. Nous sommes destinés pour la chambre (le Parlement) des élus. Ce que vous venez de faire est appelé intihab — une élection. « Intihab » vient du mot nuhbah, qui signifie « crème ». N’oubliez pas que la crème sera de la même nature que la substance utilisée. La crème qui est sur le dessus est la même que la substance à sa base. De même, le yaourt, le lait ou le citron vert auront donc une même crème pour les accompagner. »
Après avoir entendu cette anecdote, j’ai dit que ce que Tahir Efendi avait exprimé était en effet une très bonne paraphrase du hadith : « Vous êtes gouvernés tels que vous êtes ».
La question doit être traitée au niveau local en rétablissant une génération moralement épuisée. Comme le dit Bediüzzaman, notre devoir est de réparer un fort qui a été détruit depuis des siècles. Pendant des siècles, il a été endommagé de toutes parts. Nous devons saisir notre responsabilité et commencer à former les nouvelles générations. Nous devons leur faire adopter les valeurs de leur propre héritage spirituel ; elles ont besoin d’apprendre cette pensée et ces manières. Dans le cas contraire, ces transgressions continueront. Et continuer à y répondre de manière réactionnaire fait de nous des tyrans. La question doit être traitée en profondeur. Quel est notre problème ? Comment peut-il être réglé ? La question doit être résolue dans le respect de la voie du Prophète. Le Messager de Dieu, pour l’amour de qui Dieu divisa la lune en deux en un instant , s’est efforcé avec tant de diligence, pendant la période de ses vingt-trois années de mission prophétique, à éduquer son peuple à la patience. S’il avait prié pour cela, Dieu aurait immédiatement transformé leurs cœurs en des cœurs angéliques, comme par miracle. Mais il était un enseignant pour guider les gens. Quels sont les moyens pour une bonne éducation, combien d’efforts devons-nous faire, combien de remue-méninges sont-ils nécessaires ? Le Messager de Dieu l’a montré de par ses souffrances personnelles. Voici ce qui est nécessaire ; il est au-delà du pouvoir humain de le changer. Les lois de la création de Dieu ne changent pas. Cependant, la plupart des gens ne le savent pas ; ils sont sourds et aveugles à cela. Telle est la voie à suivre. Comme le dit le célèbre poète Necip Fazıl : « Tout le reste n’est que futilités. » Ce qui doit être dit aux misérables générations rampant depuis de longues années est, comme le dit le poète : « Vous avez beaucoup rampé le visage contre terre ; il est grand temps que vous vous redressiez! »
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