La consultation

La sagesse du Messager se montrait quand il consultait ses Compagnons. Cette pratique est si importante en islam qu'il n'arrivait jamais à une décision, surtout dans les affaires publiques, sans y avoir recours. Parfois, il organisait même des consultations concernant ses affaires personnelles. Pour ne citer que quelques exemples:

  • Aïcha accompagna le Prophète durant la campagne des Banu Mustaliq. Lors d'une halte, elle perdit son collier et se mit à sa recherche. Quand elle revint, elle s'aperçut que l'armée était repartie sans elle, les conducteurs de chameaux croyant qu'elle était toujours dans son palanquin. Safwan, chargé de ramasser ce qui était laissé ou perdu derrière les caravanes, la trouva et la ramena à l'armée. Dans le scandale qui s'ensuivit, sa fidélité fut remise en doute, principalement par les Hypocrites.

Le Messager savait qu'elle était innocente. Cependant, comme les Hypocrites utilisaient cet incident pour le calomnier, il consulta certains Compagnons comme Omar et Ali. Omar disait que Aïcha était sans nul doute chaste et pure, et qu'elle avait été calomniée. Quand on lui demanda comment il savait cela, il répondit:

«Ô Messager de Dieu, un jour où tu étais en train de prier, tu t'arrêtas et expliquas que l'archange Gabriel était venu t'informer qu'il y avait une impureté sur tes chaussons. Alors s'il y avait une quelconque impureté chez Aïcha, Dieu t'en aurait sûrement informé.»[1]

Le Messager, qui dit un jour: «Quiconque demande conseil, ne le regrettera pas à la fin»[2], consultait toujours ceux qui pouvaient lui donner une opinion bien informée sur un sujet en particulier.

  • Il consulta ses Compagnons avant Badr, le premier grand affrontement militaire post-hégire, pour décider s'ils devaient oui ou non se battre contre l'armée mecquoise qui s'approchait. Les forces musulmanes étaient au nombre de 305 ou 313, tandis que les Mecquois étaient environ 1000. Un porte-parole pour les Émigrés et un autre pour les Secoureurs se levèrent et proclamèrent leur empressement à le suivre partout où il les guiderait.[3] Pendant toute sa vie, tous les Compagnons promettaient sans cesse de le suivre à chaque pas qu'il faisait, et de mettre en œuvre tous ses ordres. Malgré cela, le Messager les consultait à propos de presque toutes les affaires de la communauté en général afin que cette pratique devienne comme une seconde nature pour eux.

Pendant la Bataille de Badr, l'armée musulmane était positionnée quelque part sur le champ de bataille. Hubab ibn Mundhir, qui n'était pas un Compagnon de premier plan, se leva et dit:

  • Ô Messager, si Dieu ne t'a pas ordonné de prendre cette position, plaçons-nous autour des puits et bouchons tous les puits sauf un pour que l'ennemi soit privé d'eau. Installons ta tente à côté du seul puits ouvert (duquel nous prendrons de l'eau), et nous t'encerclerons.

Le Messager adopta son idée.[4]

  • En 627, les Qoraïchites s'allièrent avec certaines tribus du désert et avec la tribu juive des Banu Nadhir qui s'installa à Khaybar après son expulsion de Médine. Averti de leurs plans, le Prophète fit appel aux idées de chacun pour trouver le meilleur moyen de se défendre contre l'offensive ennemie. Salman al-Farisi suggéra de creuser une tranchée autour de Médine, stratagème jusque là inconnu des Arabes. Le Messager ordonna d'appliquer cette idée. Et cette guerre fut pour toujours mentionnée comme la Bataille de la Tranchée.[5]
  • Les musulmans trouvaient le Traité de Houdaïbiya difficile à accepter et étaient peu disposés à obéir à l'ordre du Prophète d'immoler leurs animaux sacrificiels sans faire le pèlerinage. (L'une des conditions du traité était qu'ils ne pouvaient pas entrer à La Mecque cette année-là.) Le Messager consulta son épouse Oumm Salama. Elle répondit: «Ô Messager, ne répète pas ton ordre de crainte qu'ils ne te désobéissent et ne périssent. Sacrifie tes propres animaux et retire tes vêtements de pèlerin (ihram). Quand ils comprendront que l'ordre est catégorique, ils t'obéiront sans hésiter.» Le Messager fit comme elle le lui avait suggéré.[6]

[1] Halabi, Insan al-'Uyun, 2:613
[2] Haythami, Majma' az-Zawa'id, 2:280
[3] Ibn Sa'd, Tabaqat, 3:162; Muslim, "Jihad," 83 ; Ibn Hisham, 2:266-67
[4] Ibn Hisham, 2:272
[5] Ibid., 3:235; Ibn Sa'd, 2:66
[6]Bukhari, "Shurut," 15